5/18/08

Contrats Chine-R.D.Congo: Point de vue d'un expert spécialiste de la Chine

 



A propos de Contrat de Collaboration entre le Gouvenement de la RDC
 et quelques entreprises chinoises:
Point de vue d'un Expert spécialiste de la Chine

 
 Introduction
 
Le contrat de Collaboration entre le Gouvernement de la RDC et quelques entreprises chinoises a coulé beaucoup d'encres et de salives ces deux dernières semaines. Et pour cause, les violons ne s'accordent pas entre la majorité au pouvoir et l'opposition au sujet dudit contrat.

 
En fait, notre silence, depuis que la question a alimenté les débats dans l'opinion tant nationale qu'internationale, a été interpreté de différentes manières par les uns et les autres. Il est donc temps que nous quittions ce mutisme pour exprimer notre avis en tant qu'expert congolais spécialiste de la Chine sur la question. Notre expertise tient au fait d'avoir fait nos études doctorales en droit international en République Populaire de Chine de 2001 à 2006.

 
En effet, de Septembre 2001 à Juillet 2003 nous avons  étudié la langue chinoise à  Peking University, Université la plus prestigieuse de la Chine, ensuite de  Septembre 2003 à Juillet 2006 nous avons fait des études doctorales à Dalian Maritime University School of Law où nous avons soutenu notre thèse avec mention grande distinction le 16 juillet 2006 sous le titre : "A Comparative Study of the Principle of Freedom of Trade in Congolese Law and Chine Law: Reasons for Congo to Learn from Chinese Experience"

Ayant ainsi vécu en Chine pendant 5 ans, connaissant les méandres du droit chinois, de la culture chinoise en général et en matière de passation de contrat ou de tout autre engagement en particulier, nous pensons, sans fausse modestie, que nous aurions été d'une certaine utilité, sinon d'une utilité certaine dans les discussions, l'analyse et la critique du contrat entre la RDC et la partie chinoise. Ceci pas toujours de manière officielle ou intéressée, mais peut être de manière officieuse mais efficace pour l'intérêt la République. Car personne ne peut prétendre être capable de réléver seule  les défis de l'heure de notre société. L'apport de tous et de chacun est donc nécessaire pour vaincre la pauvrêté qui met à serieuse épreuve la dignité de notre peuple.

Voila pourquoi, nous avons decidé en ame et conscience de rompre le silence et de prendre en mains notre responsabilite et notre liberte tant academique que citoyenne pour formuler l'avis que voici.

 
I. Quant à la forme

 
De prime à bord, nous sommes confrontés à une difficulté majeure. Celle de nous pronconcer sur cette question d'une si grande importance, tant les conséquences de ce contrat, s'il venait à être executé, sont graves et lourdes non seulement sur notre vie présente mais aussi sur celle de nos enfants et de nos petits enfants. Nous devrions donc traiter cette question avec toute la prudence et la delicatesse possible et avec tout le sens de responsabilité . En outre, comment se prononcer sur un contat qu'on a pas vu, lu encore moins su le contenu?

Heuresement que le débat parlementaire sur la question nous a donné l'opportunité d'en connaitre quelques aspects de son contenu. Nous ne réagirons donc que par rapport à ces quelques aspects.  Mais avant toute chose, j'aimerai exprimer une préoccupation liée non seulement à ce cas présent mais à d'autres que nous avons eu à deplorer par le passé. Ce que depuis un certain temps le pouvoir en place a pris une habitude qui consiste à confier la redaction des actes juridiques d'importance capitale pour la République à des groupes restreints, travaillant en cachette pour produire des résultats catastrophiques. C'est le cas du code des investissements  et du code minier actuels, pour ne citer que ceux-là. A cela vient s'ajouter le contrat de collaboration avec la Chine. Et pourtant, les compétences ne manquent pas dans ce pays.

En effet, Je me rappele encore de la Commission de reforme du droit zairois devenue depuis la révolution ou la libération afdelienne, Commission de reforme du droit congolais alors dirigée des mains de Maitre par l'éminent professeur Bonaventure Kalongo Mbikayi, dont je salue au passage la mémoire avec respect. Cette commission avait produit le code de la famille, chef d'oeuvre, tant l'innovation à travers l'équilibre entre la modernité et la tradition congolaise en matière du droit de la famille est fascinant.
 
Alors, pourquoi le Gouvernement ne crois plus en ses savants? Pourquoi le Gouvernement persiste dans sa fausse route en confiant des textes de grande importance à des mains inexpertes qui finissent par produire des résultats catastrophiques contre la République?

Revenons au contrat de collaboration avec la Chine. Contrat mystérieux pour certains, fantôme pour d'autres, car on ne peut pas le voir pour les analyser. Même l'élite universitaire que nous sommes ne pouvons mettre la main dessus, à moins de nous transporter physiquement au Cabinet de son Excellence Monsieur le Ministre des Travaux Publics pour en prendre connaissance. Et meme alors, il n'est pas evident que nous pourrions l'obtenir. Mais a-t-on oublié que nous vivons en pleine post-modernité ? Où les idées, les images et  les documents peuvent être numerisés, ainsi ils peuvent circuler dans le monde, devenu village planétaire, Galaxie de Marconi (Mac Luhan) sans que déplacement physique soit nécessaire? Et que les consultations peuvent se faire selon les mêmes procedés?

En sus, comment justifier le désequilibre dans la qualité des parties signataires? Il semble que le contrat de collaboration dont question serait signé du coté congolais par certains membres du Gouvernement dont le Ministre des Travaux Publics, alors que du coté chinois il serait signé par les représentants de quelques entreprises  chinoises intéressées. Pourquoi ne pas respecter la voie diplomatique en signant d'abord un Protocol d'accord entre les deux Gouvernements pour ensuite prendre des mesures d'execution notamment en signant le contrat de collaboration entre les entreprises congolaises et chinoises qui se retrouveront sur terrain? Si c'est une Convention d'investissement que les parties avaient l'intention de signer, elles n'avaient qu'à signer une Convention dont l'objet consisterait dans la garantie que le Gouvernement congolais donnerait aux investissements chinois, notamment en ce qui concerne l'eventuelle nationalisation devant être subordonnée à une indemnité juste et équitable conformément aux préscrits de la Constitution du 18 février 2006 de la RDC.
 
La Convention d'investissement ne comporte pas des matières relatives aux modalités de constitution de Joint-Venture ou encore aux modalités d'exploitation de la société à créer. Il est curieux que le Gouvernement se soit substituée à la Gecamine dans ce fameux contrat de collaboration en prenant des engagements en ses lieu et place. Or, nous savons qu'en matière de la stipulation pour autrui, car c'est de cette catégorie juridique qu'il s'agit ici, la tierce partie ne peut être que bénéficiaire des droits mais elle ne peut subir des obligations voulues par les parties au contrat. Or, dans le cas d'espèce, le Gouvernement a stipulé une obligation à charge de la Gecamines, notamment céder ses concessions et titres fonciers, sans son consentement. Et pourtant nous savons très bien que le Gouvernement et la Gecamines sont deux personnes morales distinctes, même si c'est l'une qui a crée l'autre. Pareille obligation impose à la Gecamines est donc nulle et de nullité absolue. Pour être valable en droit, la Constitution d'une pareille Jointe-Venture devait se faire entre la Gecamines et les sociétés chinoises intéressées.
 
Au plan juridique, la convention d'investissement n'a pas un régime juridique fixé par la loi. Cependant, la doctrine considère qu'il s'agit là d'un acte juridique relevant du droit interne. Telle est la thèse enseignée par le professeur Lukombe Ngenda, these soutenue également dans ses ouvrages sur le droit congolais des sociétés. En revanche, le professeur Réné-Jean Dupuis considère, dans la sentence arbitrale rendue dans l'affaire de Texaco-Calasiatic, affaire ayant oppose la Lybie à la Société Texaco, les conventions d'investissements comme des contrats internationalisé s à cause notamment du fait que ces contrats sont soumis à l'arbitrage international quasi-juridictionnelle.
 
Le top secret qui a entouré la signature de ce contrat, jusqu'à exclure la Gecamines la principale concernée, est susceptible de donner la voie à la spéculation inutile et à la suspicion, comme si on avait des choses à caher. Pourquoi avoir négocié en cachette ce fameux contrat de collaboration? Dieu seul sait.
 
Quant à la clause compromissoire, il semblerait qu'elle aurait désigné les tribunaux chinois compétents. Comment cela peut-il être possible quand nous savons qu'en matière de la convention d'investissement cette matière rélève du droit international privé, ainsi que nous le verrons. C'est donc le droit du pays de la partie qui fournit la prestation importante du contrat qui sera applicable. S'agissant de la juridiction compétante, en matière de conventions d'investissement c'est la Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre Etats et ressortissants d'autres Etats de 1965, signée sous l'égide de la Banque Mondiale, qui est d'application et qui désigne le Centre International de Règlement des Différends d'Investissement, CIRDI en sigle, comme juridiction  compétente. Il est donc inacceptable que dans le cas sous examen les tribunaux chinois soient désignés comme étant compétents.    

II. Quant au fond
 
 
Quant au fond, il semble que la partie chinoise mettra à la disposition de la RDC une somme de 9 milliards de dollars americains pour la construction des infrastructures, notamment des auto-routes, des chemins de fer, des écoles, des Universités, des hopitaux,... et en contre partie, la Chine exploitera des minérais congolais. Comme on n'a pas lu le contrat, c'est toute la difficulté que nous rencontrons pour apprécier le contenu réel des engagements des uns et des autres.
 
Mais partant du débat qui a eu lieu au Parlement où il en découle que:

« comment pour quelque 9 milliards consignés dans le contrat, on pouvait exploiter des minerais d'une valeur de plus de 80 milliards suivant le prix moyen actuel du cuivre sur le marché »,et à son excellence de répondre : "Grâce à un petit exercice de calcul, le ministre est plutôt tombé dans les 35 milliards, avant de préciser que ce n'était pas encore de valeurs réelles."

Il a, en outre, tenu à rassurer les députés que les Gouvernements congolais et chinois s'étaient concertés au préalable avant la signature de cette convention.. .".Cette concertation devait etre sanctionnée par un protocole d'accord ou par un communiqué tout au moins. Où est-il ce Protocole ou ce Communiqué? On ne dit rien.

C'est à ce niveau notamment qu'il y a problème. Que 9 milliards de dollars rapportent aux chinois 18 milliards de dollars, ou encore 27 milliards (le triple), on comprendrait, mais aller jusqu'a 35 milliards de dollars de gain sans que cela ne puisse choquer son Excellence, qui pourtant représente les intérêts de la RDC, il y a à se poser des questions sur la qualité de la représentation du peuple congolais par ses propres fils. Il devient alors clair que ceux qui protestent contre ce contrat n'ont pas tellement tort. Qu'il s'agisse de l'opposition congolaise, qu'il s'agisse de la Belgique, notre partenaire historique, de l'Union Europenne et du Gouvernement des Etats Unis, nos principaux partenaires, qu'il s'aggissent encore des institutions de Bretton Wood que sont la Banque mondiale et le Fond monétaire international.

De ce qui précède, nous nous demandons pourquoi la précipitation, la cachete et le désequilibre flagrant en defaveur de la RDC?
 
S'agissant d'un contrat d'une si grande importance, pourquoi ne pas prendre le temps de reflexion? Pourquoi ne pas consulter des experts nationaux et internationaux pour apprécier le projet du contrat avant de s'engager?

Pourquoi ne pas penser à installer, par exemple, l'usine ou des usines de raffinerie des nos minérais sur place au pays pour n'exporter que des lingots, ce qui donnerait pour le seul cas du cuivre le résultat plus intéressant de plus de $8,000.- la tonne au lieu de $1,200.- la tonne pour le brut. Et pour quelle raison a-t-on accepté d'exporter la terre de nos ancêtres à des milliers de kilomètres, sachant ce que représente la terre pour le peuple africain en général et le peuple congolais en particulier au plan surnaturel! Chez nous la terre est sacrée, elle est l'expression des liens reels entre nos ancetres et nous, nous avons donc l'obligation surnaturelle de bien la garder et de la garder au sacrifice de notre sang.
 
Le raffinage de nos minérais sur place a encore l'avantage de laisser sur place les scories (déchets) qui peuvent servir à produire d'autres minérais, c'est-à-dire d'autres sources de revenu pour le Gouvernement qui est d'ailleurs à la recherche de fonds pour le financement de divers autres projets de développement en faveur du peuple congolais, peuple devenu dindon de la farse et qui n'a que trop attendu le développement qui tarde toujours à venir. Le raffinage des minérais au pays permettrait enfin de créer des milliers d'emplois en faveur de la jeunesse congolaise dont le chomage est devenu sa seconde nature.

Dans ces conditions, ceux qui parlent de 80 ou de 90 milliards de dollars que le chinois gagneraient dans ce contrat n'ont-ils pas raison? 9 milliards de dollars contre 90 milliards de dollars n'est-ce pas la un vrai cas de contrat leonin? Les institutions de Bretton Wood n'ont-elles pas le droit de nous conseiller à la prudence pour ne pas aggraver la situation de notre dette extérieure avec ce contrat leonin? N'ont-elles pas droit à la parole elles qui soutiennent la moitié de notre budget national? Même si par ailleurs ces mêmes institutions financières internationales ont fait preuve de partialité en defaveur des pays du tiers monde et en faveur de l'Europe. Cette même Europe qui avait été complètement reconstruite après la seconde guerre mondiale sur fonds propres du Gouvernement des Etats Unis connus sous le nom de "plan marshall". Quant aux pays africains, pillés par les colonialistes européens et détruits par les conflits armés internes, internationaux et internationalisé s, souvent sous l'instigation de certaines puissances occidentales, cette même Europe disions nous se porte aujoud'hui en donneur de conditionnalité et de censure contre les flux financiers en faveur des pays africains.

Les institutions financières internationales auraient mieux fait de travailler de concert avec les sociétés d'investissements chinoises qui disposent en ce moment de crises, crises caracterisées par l'envolée des cours du brut sur les marchés mondiaux, la hausse des prix des denrées alimentaires notamment les céréals dans le monde entier, crise économique et financière internationals; de reserves en devises fraiches évaluées à des milliers de dollars américains, équivalant d'ailleurs au budget fédéral annuel du Gouvernement des Etats Unis. 
 

III. Conclusion
 
 
Le Gouvernement doit donc faire confiance en ses experts et surtout en ses élites universitaire qui n'ont pas nécessairement besoin d'avoir ou de pouvoir, mais qui ont seulement le souci de la verité scientifique, académique, juridique, sociale et politique.

Nous recommendons donc vivement au Gouvernement de bien vouloir rediscuter de la question en tenant compte des recommandations de l'Assemblée Nationale, de nos principaux  partenaires internationaux et des experts congolais et internationaux afin de sauvegarder les intérêts de la République dans ce contrat de collaboration qui en fait doit être scindé en deux parties ou trois parties. Une partie devra concernerait la Convention d'investissement entre le Gouvernement de la République démocratique du Congo et les enterprises chinoises et l'autre partie constituerait une Convention de Joint-Venture entre la Gecamines et les enterprises chinoises ayant pour objet les modalités d'exploitation des minérais congolais. La Gecamines pourrait signer le même genre de Convention de Joint-Venture avec d'autres partenaires européens, américains ou japonais dans les mêmes conditions de marché. L'essentiel étant que la Gecamines reprennent ses activités de production de minérais après un certain niveau de rafinage. Une autre partie concernerait alors la creation d'un consortium entre le Gouvernement de la RDC et les enterprises chinoises et d'autres pour la reconstruction des infrastructures de base. Ainsi les choses seraient claires et la République aurait à gagner.
 
 
Professeur KIRONGOZI ICHALANGA
Professeur Associé à la Faculté de Droit de l'Université de Kinshasa
Et Visiting Professor at University of Maine, School of Law/ U.S.A
 
Contact : claude_in_beijing@ yahoo.fr,

 
.

__,_._,___



--
Jean-Louis Kayitenkore
Procurement Consultant
Gsm: +250-08470205
Home: +250-55104140
P.O. Box 3867
Kigali-Rwanda
East Africa
Blog: http://www.cepgl.blogspot.com
Skype ID : Kayisa66

No comments:

Post a Comment