7/9/08

Grand dessein et arrière-pensées
- 6 juillet 2008 - par FRANÇOIS SOUDAN

Immigration, sécurité, Proche-Orient, codéveloppement... Au-delà de ce que devait être et de ce que sera finalement l'Union pour la Méditerranée, les chefs d'État et de gouvernement auront-ils le courage d'évoquer les seuls sujets qui vaillent aux yeux de leurs peuples ? Réponse le 13 juillet à Paris.

Ce fut, à l'origine, une belle et forte idée électorale, mise en avant par le candidat en campagne, puis reprise avec valeur d'engagement dans son premier discours par le président élu.

Ce fut, par la suite, l'exemple même du volontarisme sarkozien, censé bousculer les eurocrates frileux à coups d'opérations chocs, de raids diplomatiques en solo et de relations personnelles.

Ce fut, enfin, sur fond de cafouillages et de tractations pas toujours glorieuses, la bataille perdue contre le principe de réalité européen qui veut que la France ne décide plus seule, surtout quand il faut y mettre les moyens.

Au final, une « union méditerranéenne » devenue « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée » - glissement sémantique qui en dit long sur le retour du juridisme et le délavage d'un grand dessein au sortir de la lessiveuse UE.

Si le sommet fondateur de l'UPM, à la veille de la fête nationale française, sera sans doute un moment d'exhibitionnisme médiatique, qu'en restera-t-il une fois dissipés les flonflons du 14 Juillet ?

La conservation d'une certaine « priorité » méditerranéenne, certes, et la réaffirmation de son caractère stratégique, de quoi compenser un peu, aux yeux des pays de la rive sud, le processus d'élargissement - dilution du projet initial.

Des engagements aussi, sans nul doute intéressants, sur l'environnement maritime, les énergies alternatives, la création d'une grande université Euromed en Slovénie et la mise en œuvre d'une initiative pour le développement des affaires en Méditerranée.

Une architecture institutionnelle, enfin, avec coprésidence, comité permanent et secrétariat, en espérant qu'elle ne soit pas une usine à fonctionnaires de plus.

Quant au contenu politique du sommet de Paris, mieux vaut, au regard du projet de résolution dont J.A. s'est procuré une copie, ne pas en attendre autre chose que le smic : un paragraphe lénifiant sur le Proche-Orient réaffirmant le soutien des participants aux négociations israélo-palestiniennes et israélo-syriennes, sans oublier, pour ne froisser personne, l'hommage rendu à l'initiative arabe de paix.

Une demi-ligne sur la coopération antiterroriste.

Et une courte pétition de principe où est affirmée « l'ambition de construire un avenir commun basé sur des valeurs partagées [?] telles que le plein respect des droits de l'homme et de la démocratie, la promotion des droits des femmes, le respect des minorités, le combat contre le racisme et la xénophobie… ». Enfin, en point d'orgue, la très hypothétique photo d'une poignée de main Olmert-Assad, pour laquelle Nicolas Sarkozy se battra jusqu'au bout sans aucune garantie de succès.

Le problème, le vrai, est que cette UPM n'a aucune chance d'aboutir si les opinions publiques du sud de la Méditerranée n'y adhèrent pas et si les arrière-pensées, chez les participants au sommet, dominent.

Il faut pour cela trois conditions. La première est que l'UPM ne donne pas l'impression de vouloir simplement contourner l'obstacle sur lequel a échoué Barcelone, à savoir le blocage du processus de paix au Proche-Orient, ce qui reviendrait à l'entériner.

La deuxième est que la dimension sécuritaire du sommet ne soit pas réduite à la seule coopération contre le terrorisme, au risque d'apparaître comme une affaire de police.

La troisième est que soit abordée avec courage, par les chefs d'État arabes présents à Paris, la question essentielle des flux migratoires et de la politique européenne, de plus en plus restrictive en la matière.

Pour des milliers et des milliers de migrants clandestins, dont bon nombre de jeunes Maghrébins, la Méditerranée n'est pas un lac de paix, mais le théâtre d'une guerre impitoyable en même temps qu'un immense cimetière sous-marin.

Et si leurs fantômes venaient hanter les couloirs du Grand Palais, à Paris ?

 





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Jean-Louis Kayitenkore
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