10/11/08

Du krach boursier à l'économie réelle, les mécanismes de la contagion

Si spectaculaire soit-elle, la débâcle boursière, dont les gouvernements et les grandes banques centrales peinent à venir à bout, n'est que la partie émergée d'une crise en train de se propager à l'économie réelle. Une spirale baissière et récessive s'est enclenchée. Les marchés anticipent une chute des profits des entreprises, qui font face à des perspectives d'activité dégradées. Ils vendent leurs titres. Les entreprises ne peuvent plus se financer sur les marchés actions, et elles commencent à être confrontées au resserrement du crédit. Certaines d'entre elles, notamment les PME, ne s'en relèveront pas. Partout, les perspectives d'embauche se détériorent, le chômage s'accroît, les revenus diminuent. Comme toujours en pareilles circonstances, ce sont les plus vulnérables parmi les entreprises et les ménages qui seront les premiers touchés.

C'est la prochaine étape de la crise : d'ici à Noël, les hedge funds, pressés par leurs clients (individus, entreprises, banques, etc.) de demandes de remboursement, vont vendre près de 600 milliards de dollars d'actifs, selon Patrick Artus, directeur des études économiques de Natixis. Ces fonds spéculatifs, au nombre de 10 000, gèrent 2 100 milliards de dollars d'épargne et disposent au total de plus de 6 000 milliards de dollars d'actifs. Ils peuvent donc aussi puiser dans leurs réserves pour répondre aux exigences de leurs clients. Ces derniers doivent prévenir à l'avance, entre un mois et demi et trois mois, les hedge funds quand ils désirent être remboursés. La prochaine fenêtre de tir est le 31 décembre. La perspective de ventes d'une telle ampleur augure mal d'un possible retournement à la hausse des marchés d'ici à la fin de l'année.

Des "effets de richesse" négatifs sur les entreprises

Quand les établissements financiers, les grandes entreprises ou les PME voient leurs actifs se déprécier de 25 % en un mois - ce qui a été le cas, selon Xavier Timbeau, chercheur à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), sur la place de Paris -, ils font face à des pertes potentielles considérables et à un choc "non encaissable sur leurs bilans". Ils doivent donc réduire la voilure, ce qui amplifie la dégradation des perspectives d'activité, et vendre, ce qui accroît la panique des marchés. Les prix baissant, un nombre croissant d'acteurs est acculé à la vente, et la spirale négative s'auto-entretient. Les entreprises dépensent moins. Redoutant une chute de leurs profits, elles diffèrent ou renoncent à leurs projets d'investissement, réduisent leurs coûts et revoient à la baisse leurs perspectives d'embauche, quand elles ne licencient pas et mettent la clé sous la porte. En France, par exemple, dans le secteur de la construction, où les entreprises s'étaient habituées à une croissance forte, les faillites ont augmenté de 35 % au cours des sept premiers mois de 2008 par rapport à la même période de 2007. Et la Coface, spécialisée dans l'assurance-crédit, fait état d'une hausse de 15 % en un an des faillites des très petites entreprises.

Des coûts de financement en hausse et le resserrement du crédit

Dans un tel environnement, les emprunteurs - ménages ou entreprises - voient leurs primes de risque et leur endettement augmenter sensiblement, analyse Patrick Artus, directeur des études économiques de Natixis. Trouver des sources de financement est en effet plus difficile et coûte plus cher. Face à l'augmentation probable des taux de défaut, les banques doivent accroître leurs fonds propres et, par voie de conséquence, elles prêtent moins. "Aux Etats-Unis, indique Evariste Lefeuvre (Natixis), le taux de défaut des ménages sur les crédits immobiliers atteint 6,5 %, ce qui représente plus de 300 milliards de dollars de pertes pour les banques de détail. La situation n'est pas comparable en Europe où les taux de défaut sont beaucoup plus faibles (0,4 % en Espagne, 0,5 % en Allemagne)."

Le resserrement du crédit, annoncé depuis plusieurs mois dans les enquêtes des banques centrales, est en train de devenir une réalité. Les prêts aux entreprises avaient augmenté de 13 % en Europe et de 15 % aux Etats-Unis en juillet (par rapport à juillet 2007). "Au mois d'août, cette progression s'est brutalement interrompue, et septembre devrait être pire", souligne M. Artus. Ce phénomène de "credit crunch" est, dit-il, "d'autant plus douloureux quand les taux d'autofinancement des entreprises sont faibles, ce qui est le cas en Espagne et en France". Les plus vulnérables y laisseront des plumes. "Une PME qui a une trésorerie équilibrée sur l'année, mais qui a besoin d'aide pour financer son activité risque, dans un tel contexte, de voir sa banque lui refuser sa ligne de crédit", explique M. Timbeau. Le même mécanisme, ajoute le chercheur de l'OFCE, peut jouer du côté des ménages, qui, s'ils sont à découvert, risquent de se trouver devant un banquier qui leur dira de vendre la voiture ou l'appartement acheté à crédit ou qui leur refusera un prêt immobilier...

Des pans d'activité fragilisés et des marchés du travail dégradés

La crise immobilière n'en finit pas de sévir aux Etats-Unis où, selon Natixis, il n'y aura pas de stabilisation du marché avant le second semestre de 2009. L'Espagne, l'Irlande et, depuis peu, la France sont également sévèrement touchées. Or, dans l'Hexagone, ce secteur avait été très créateur d'emplois ces dernières années. Les difficultés à venir des PME joueront aussi dans le sens d'une détérioration du marché du travail. Incertains de l'avenir, les ménages, dont la consommation est directement corrélée au taux de chômage, vont se serrer la ceinture : ils anticipent logiquement une diminution de leurs revenus. Et ceux qui ont de l'épargne subissent le même effet que les entreprises : la dépréciation de leurs actifs entraîne un appauvrissement qui n'incite pas à faire des projets.

"La crise actuelle sera coûteuse en dette et en croissance. Elle s'annonce plus longue qu'une crise classique", ajoute M. Lefeuvre. Le seul moyen d'éviter semblable scénario est que la puissance publique "garantisse le passif des banques de détail", analyse M. Artus. "C'est ce qu'ont fait les Irlandais et ce vers quoi s'oriente le Royaume-Uni. Et c'est aussi ce que devrait faire la France." Faute de quoi, la crise s'éternisera.

Claire Guélaud






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